Reconfigurer l’avion en plein vol…
Une métaphore permet souvent de rendre compréhensible une notion complexe…
Reconfigurer l’avion en plein vol. Au décollage comme à l’atterrissage, il s’agit toujours d’un avion mais ses principales caractéristiques ont été modifiées alors qu’il a continué de voler, sans perdre d’altitude, ni de vitesse.
Transformer une entreprise dans son organisation, dans sa façon de travailler, dans son management, dans sa culture ; bref la faire changer de paradigme, tout en continuant de produire.
C’est aujourd’hui et demain le challenge que nous avons à relever dans les entreprises ; celui du changement permanent où la périodicité des changements est plus courte que la durée de la mise en œuvre. Ils s’enchaînent si rapidement, ils s’imbriquent tellement qu’aucun temps de pause n’est possible et que les salariés ont l’impression d’un continuum où les changements ne sont plus distincts l’un des autres.
Changer tout en produisant ; produire tout en changeant.
Cela signifie aussi que la transformation est intégrée au travail et ne se surajoute pas à l’activité quotidienne comme une contribution ponctuelle. Les collaborateurs de l’entreprise peuvent vivre cette nouvelle donne comme dynamique, enthousiasmante, source d’apprentissage… et aussi comme inconfortable, consommatrice d’énergie, fatigante. Selon leurs profils, selon les circonstances, selon la météo, selon les aléas du vol… les passagers, les pilotes, le personnel de bord vivent l’expérience de façon totalement différente.
Les paramètres qui colorent l’expérience de la reconfiguration sont multiples et leurs combinaisons complexes à l’image du monde VICA, où Volatilité, Incertitude, Complexité et Ambigüité se mêlent pour offrir autant d’opportunités que de risques, selon le regard que l’on porte sur cette réalité.
Pour autant, nous pouvons identifier quelques ressources nécessaires pour réussir.
- Des compétences métier très pointues et des compétences transversales très étendues, avec une profondeur de l’expertise et la capacité à interagir avec de nombreux interlocuteurs, ce que nous pouvons aussi nommer la maturité professionnelle.
- Le droit à l’erreur qui autorise à oser, avec le nécessaire apprentissage pour que l’erreur soit apprenante. Cela signifie aussi de limiter les risques grâce à des essais sur des périmètres circonscrits, sur une durée limitée… Le « test & learn », plus qu’une pratique un état d’esprit : « Je n’échoue jamais ; soit je réussis, soit j’apprends ».
- La culture du bien-être ET de la performance. Quand on se sent bien dans son travail, on réussit mieux. C’est le bon sens du terrain qui nous le dit et aussi des études qui chiffrent le gain de performance à 20 % environ.
- La capacité à remettre en cause ses pratiques, à être attentif à un environnement élargi, à sortir de ses routines de raisonnement, à vivre de nouvelles expériences en étant conscients des émotions ressenties… à développer son ouverture perceptive.
- La capacité à confronter les points de vue sans affronter les personnes, c’est-à-dire s’enrichir de points de vue différents exprimés avec assertivité et conviction, qui enrichissent le débat et qui sont respectueux de l’autre, sans jugement sur la personne.
- L’énergie insufflée dans le système grâce à un accompagnement qui développe l’autonomie, à des signes de reconnaissance authentiques et réguliers, et à une exigence qui tire vers l’excellence et rend fier.
Dernier facteur de réussite de l’avion en transformation : ne pas trop diminuer la vitesse et l’altitude (une tentation pour réduire les tensions à l’intérieur de l’appareil), ET ne pas trop tirer sur le manche (une tentation pour faire un exploit) ; faute de quoi l’avion décroche et part en vrille ! Par ces temps nouveaux, tout est dans le pilotage nuancé, raisonné, en conscience…